Le zodiaque de verre
Les vitraux se lisent bien sûr de l’intérieur de l’édifice, éclairés par la lumière extérieure. Vous ne pouvez voir les détails de la rosace ouest car elle est en partie dissimulée par le buffet de l’orgue. La voici reconstituée. Elle date du 13ème siècle. Les médaillons entourés de jaune signalent les vitraux remplacés et qui ne sont donc plus d’origine.
Dans l’esprit des maîtres verriers du Moyen Âge, rosaces et vitraux n’ont rien de décoratif. Ce sont des livres aux pages de verre que le soleil fait découvrir au fil de la journée. On peut dire que c’est lui qui en tourne les pages et offre ainsi un enseignement différent, selon les heures du jour. Le zodiaque en verre de Notre-Dame de Paris étant intégré à la rosace ouest, il s’anime en fin d’après-midi.
Au centre de la rosace, nous voyons la vierge à laquelle sont dédiées de nombreuses cathédrales, alors nommées « Notre Dame ». Le premier cercle, au plus près de la vierge, représente les 12 tribus d’Israël. Il s’agit du cercle incolore, composé de médaillons à quatre feuilles.
Les signes du zodiaque, eux, se trouvent sur la moitié inférieure du 2ème cercle.
La lecture commence à gauche avec le signe du Verseau. Le Verseau ouvre ici le cycle de l’année qui se termine, à droite, avec le signe du Capricorne . Ainsi le sens de lecture va-t-il de gauche à droite en passant par le bas du cercle.
En face de chaque signe, sur la partie inférieure du 3ème cercle, est représenté le travail du mois qui lui correspond. Pour exemple : la taille de la vigne au temps du Bélier ou la moisson du blé pendant le mois du Lion.
Cette association entre signes du zodiaque et travaux du mois se retrouve dans les zodiaques sculptés. Certains y voient un simple calendrier agricole. C’est tourner le dos à la pensée médiévale, à la richesse de sa pensée symbolique. Ceux qui ont bâti les cathédrales concevaient la totalité du cosmos comme une seule et même unité vivante. Ils jugeaient qu’on ne peut vivre sur le bon rythme hors de la conscience des mouvements célestes. Pour eux, la vraie nature du temps est cyclique et sacrée. En faisant figurer les activités de l’homme face aux signes du zodiaque, ils éveillaient sa pensée à une réalité supérieure.
Sur la rosace ouest de Notre-Dame de Paris, deux signes, sur les douze composant le zodiaque, disposent d’un traitement particulier. En face du Verseau qui ouvre le cycle de l’année et du Capricorne qui le ferme, n’ont pas été représentés les travaux du mois correspondant. Face au Verseau, se tient le dieu Janus avec son double visage. Face au Capricorne, un homme et une femme qui célèbrent un banquet.
Commençons par le Verseau et le dieu Janus. On retrouve ce dieu dans bien d’autres cathédrales. « Gardée par Janus, la cathédrale toute entière est une porte de passage permettant d’accéder de la vie terrestre et profane à la nef indispensable au voyage vers le cosmos. Par elle, le ciel peut en quelque sorte descendre sur la terre. » Ces paroles sont de Michel Zehnacker qui a écrit un livre remarquable sur la Cathédrale de Strasbourg. Mais revenons à Paris.
Janus garde la porte qui sépare l’année écoulée de celle qui renaît. Son visage de gauche a des yeux sans pupille pour souligner le fait qu’il regarde vers l’année qui s’achève. Son visage de droite, dont les yeux sont complets, veille sur celle qui arrive. La nappe de la table qui est devant lui est décorée de petits carrés. Chacun d’entre eux est divisé en quatre. On peut y voir le cadre de la nouvelle année qui, comme l’ancienne, va se composer de quatre grandes étapes : deux équinoxes et deux solstices.
On dit du dieu Janus qu’il dispose d’un 3ème visage, invisible. Ce troisième visage est celui de l’instant présent vécu, tout au long de l’année, en tenant compte des réalités du ciel. Le mot « bonheur » est une contraction de l’expression ancienne « vivre à la bonne heure ». Pour les Maîtres d’Œuvre médiévaux, « vivre à la bonne heure » faisait du temps une fête et non un adversaire.
A l’autre bout du cycle, pour clore l’année, se tient le Capricorne (le vitrail d’origine est perdu) et face à lui un banquet.
Un homme et une femme célèbrent l’année écoulée ayant formé un cercle accompli, le cercle parfait qui va donner naissance à l’année nouvelle. Sur la nappe de la table est tracé le symbole de la svastika remontant aux temps les plus anciens, symbole détourné de son sens et souillé au 20ème siècle. On le retrouve dans la majorité des grandes traditions spirituelles. En quelques mots trop synthétiques, on peut dire qu’il représente le mouvement permanent de l’univers, de ses cycles et de sa régénération, à partir d’un centre qui coordonne l’ensemble. Il n’est pas surprenant de le trouver tracé sur la nappe du banquet marquant l’année qui s’achève et fait naître la suivante.
Le zodiaque en pierre
Le zodiaque en pierre de Notre Dame de Paris se trouve sculpté, lui, sur celui des trois portails situé à gauche de la grande façade occidentale. Il est très apparent. Il a été placé là, presque à notre hauteur, pour qu’on puisse le voir immédiatement en approchant de l’édifice.
Vous qui entrez ici, disent les signes zodiacaux, sachez que la véritable nature du temps est sacrée. Ses origines sont célestes.
Sur l’encadrement de la porte, ces signes sont face à vous, les métiers du mois qui leur correspondent, sont sur le coté.
Voici quelques-uns de ces signes parmi les mieux conservés.
Remerciements : Les images des vitraux de la rosace ouest sont reproduites avec l’aimable autorisation du site www.cathedrale.gothique.free.fr